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Message par Cloud Ven 31 Oct - 11:42



Réminiscences




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Des Milliers de Fleurs




Des fleurs, des fleurs par milliers. C’était le jour des fleurs. Rouges, bleues, noires, et même des blanches. Des fleurs de toutes les couleurs pour tous les cœurs. Des fleurs si belles qu’elles séduisaient les cœurs les plus durs. Les insensibles. Même Constance. Même elle. La dame de fer. Alors que le sang des gens de Gaia souillait les murs, alors que les inquisiteurs exécutaient les hommes, les femmes, les enfants, elle a pris une fleur. Elle l’a portée à son nez. Elle a fermé les yeux. Et elle a respiré son odeur capiteuse. Et elle a aimé son odeur. Et elle n’a pas entendu le cri de la grande prêtresse, une vieille dame à la peau plissée, au visage doux, habillée de créatures de la terre. Elle n’a pas entendu la vieille dame, qui protégeait le fruit de son cœur en hurlant, maudissant les hommes. Elle n’a pas vu le lynx qui s’est jeté à la gorge d’un soldat de l’armée blanche. Non, elle a juste respirée la fleur et elle l’a trouvé belle, cette fleur. Et alors que le tir a fusé, brulant l’air de son odeur de plomb et de métal brulé, elle a redressée son visage jeune, froid métallique. Et sa voix pure a craché la mise à mort du soldat qui a tuée l’élue de Gaia.


-Ma vieille amie. Si seulement tu n’avais pas été si têtue.


Constance a laissé tomber la fleur sur le corps éparpillé de la femme nue, abandonnée des hommes comme des bêtes. Levant sa propre arme à feu, d’un métal blanc scintillant, elle a visé au cœur l’enfant et puis, dans un soupir, elle est sortie.


-Brulez, brulez tout. Que tout disparaisse.


Et un feu, un feu gigantesque a épousé l’architecture du vieux bâtiment. Il a léché les rideaux des fenêtres, les planchers de bois, les contours de pierre, et il a grimpé, grimpé jusqu’au toit. Les courageux qui sortirent, affrontant l’armée blanche, furent assassinés, les uns après les autres. Les cris de ceux qui restèrent, hantèrent des années durant les tympans de la résistance. Celui, silencieux, du Crystal, aussi pur que le terrible chant du cygne a raisonné dans les âmes des siècles et des siècles durant.


Les larmes du Crystal sont silencieuses, cristallines.
Comme une eau pure, comme une souffrance innocente.
Mais une fois de l’an, il se rappelle. Le lac des Cygnes.




La Mémoire des Héros



C’est ce soir. Le soir. Enfin. La libération. L’atmosphère frelatée du Crystal Palace s’allège, les cœurs sont moins lourds, une nouvelle légèreté s’empare des gestes, des mouvements. Les discussions reviennent, derrière les portes closes. Quelques rires sincères éclosent parfois. Comme les milliers de lueurs qui s’éveillent dans chacun des coins du grand palace. Les lumières s’allument de toute part, des cierges, des bougies, l’atmosphère du Crystal Palace change. Il vit, de nouveau. Il rêve, de nouveau. Et il veut qu’on lui rappelle, une dernière fois, ce que c’est que d’être en vie. De vivre. Si fort. De croire. Encore. D’aimer. Avec tant d’intensité.


Le Crystal est silencieux, quelques minutes. La chaleur des milliers de bougies allumées sous son toit adoucie l’air froid. Il fait bon, bon vivre, l’ambiance est doucereuse. Les odeurs de cire, de parfums se mélangent à celui des vieux livres et des rideaux poussiéreux. La chaleur glisse dans les couloirs vides comme une amoureuse le long du chemin qui mène à son cœur. Elle atteint celui des hommes, ceux qui, le souffle court, regardent le rideau lentement s’ouvrir. Derrière, les danseuses, le ballet, la magie du Crystal, son apothéose. Leurs visages plein d’émotions, dévorent des yeux le spectacle intemporel, celui qui revient, tous les ans, rien que pour eux. Le terrible ballet du cygne. Ils le regardent, le cœur bondissant, osant à peine respirer pour ne rien perdre du spectacle. Ils la regardent. Swann. Au centre de la piste. Chantant leur avènement. Et quand elle tombe, les mains plein de sang. Quand elle tombe, les artistes se lèvent et tous applaudissent leur muse. Ils frappent si forts, des mains, que les mains rougissent, que le choc des os résonne dans la salle pourtant pleine, derrière le tintamarre des cris, en notes funèbres que dévore la magie noire de l’être sans substance. Le rideau se referme, l’oraison est finie. Et ce qu’ils tenaient, entre leurs doigts, cette fragilité du Crystal, cette blessure, ce sentiment, ce désir, cette communion, soudain s’envole. Comme un rêve qui disparait à l’orée du jour. Comme une nuée d’oiseaux effrayés par un chat agressif. Un coup de patte, de griffes, et les mémoires se transforment, et les souvenirs deviennent songes, et les songes deviennent réalité.


A la mémoire des héros, l’alcool coule à flot. Des odeurs d’opium, des drogues circulantes, la salle se charge de substances qui entravent les sens, qui propagent une subconscience. L’air se trouble, un léger brouillard prend peu à peu possession de l’endroit se mêlant la fumée des bougies et celle, plus dense, des cigarettes. Les artistes dansent au rythme des groupes de musiques qui s’improvisent. Les voix de ténor se mêlent à celles claires, des jeunes femmes. Les danseurs font tournoyer le brouillard sous leurs pas endiablés. Ils dessinent des anges dans les volutes de fumée. Les arts se transforment, se mélangent et se mêlent en une parfaite symbiose. La création revient, si puissante, si forte, qu’elle entrave les regards lucides et sceptiques. La création revient et avec elle des bribes de secrets. Là, cette femme, qui était-elle ? Une vieille artiste, une âme volée, prise, possédée qui, dans l’air ambiant reprends soudain forme, comme si soudain son meurtre n’était plus qu’un vieux cauchemar. Et là, cet artiste qui pleure, qui dit à qui veut l’entendre, qu’il a revu sa petite fille, celle dont il n’a plus de nouvelles depuis 50 ans, qui doit maintenant sembler plus vieille que lui alors qu’il n’y a qu’une heure à peine, il jurait être un nouveau du Crystal, un artiste de passage, sans histoire, sans passe particulier. Un saltimbanque. Mais la musique couvre sa voix, ses larmes, et aucun des artistes ne prêtent vraiment attention à lui, ils sont eux même en proie de leurs démons. Des morceaux d’histoires, des visages. Cette femme qui danse, toute seule, comme si un autre l’enlaçait, qui murmure des ‘mon amour’ au vide qui l’encadre, qui se rappelle, un court instant, qu’elle était une femme, qu’elle avait une vie, que son cœur n’a pas toujours appartenu au Crystal. Et là, au centre, danseuse éternelle, Swann tourne et tourne encore comme perdue dans la fumée. Ses yeux n’expriment aucun souffle. Elle, avant le Crystal, elle ne se rappelle rien.

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Message par Alexander James Ven 31 Oct - 21:47

Une note en entrainait vivement une autre. Ses doigts voletaient sur le piano dans une fougue gracieuse. Il caressait chaque touche mais y transmettait pourtant cet élan déchirant qui traversait tout le public. Les danseurs se jetaient sur scène. Jambes lancées en l’air, bras levés sans complainte, pointes tenues dans la douleur. Tout reflétait cette scène intense, lui rendant vie sous les yeux des spectateurs. Un seul souffle les reliait. Les yeux rivés sur leur muse, ils sentaient leurs cœurs s’emballer. Alex ne faisait pas exception à la règle. Ses fines phalanges se promenaient avec doigté sur le clavier pour jouer ce morceau sans un regard pour la partition. Quelle en serait l’utilité ? Plus que simplement jouer, il vivait cette musique comme les artistes sur scène vivaient leur chorégraphie. Et à l’instar des autres, il se leva à la fin pour frapper vivement dans ses mains épuisées, ne leur laissant aucun répit. Il s’applaudissait. Il applaudissait cette muse qui les inspirait tous. Il applaudissait ce monde qui était maintenant le sien. Le Crystal Palace et ses jouets s’engorgeaient de ce ballet glorieux. Le jeune pianiste fixait le rideau qui tombait, incapable de décrocher ses iris ambrés. Lorsqu’enfin, le tissu effleura l’estrade et coupa tout contact entre les artistes et le public, un soupir glissa sur ses lippes desséchées. La prestation était finie. Ses émotions emportées avaient encore besoin de s’en remettre… S’emparant du verre qui avait trôné tout le show sur son piano d’une main tremblante, il le porta lentement à ses lèvres et but de ce même rythme, brûlant sa gorge avec délice sous l’agressivité du liquide.

Le temps s’écoulait. Quelques heures ou minutes – peu importait au Crystal – et la fête reprit dans un ton différent. Les corps ne vibraient plus à l’unisson mais se perdaient dans leurs folies respectives. Une étrange sensation envahit le jeune brun. Une nostalgie lointaine, une innocence enfantine… Ses souvenirs l’effleuraient mais lui échappaient. Ils glissaient entre ses doigts, fuyaient son étreinte. Scellés et protégés, leur existence même semblait absurde au pianiste. Le visage tant haï de sa mère disparaissait. Ses traits s’effaçaient et avec eux, s’envolaient sa colère infinie. Un sourire s’étira sur ses lèvres, un sourire qui l’avait quitté il y avait déjà bien des années. Un sourire de joie. De pure joie. Les fantômes du passé qui le hantaient et l’empêchaient de se sentir heureux se cachaient loin de sa vue. Ces femmes détestables, ces excès de violences incontrôlables…Tout venait de se briser en mille éclats. Capturés par le Crystal fou, le brun se sentait renaitre.

Un pas.
Deux pas.
Trois pas.

Son sourire ne le quittait pas. Les yeux brillants et l’air égaillé, il s’élança sur la musique. Ses pieds le guidaient dans une danse aux rythmes de liberté. Il était heureux comme il ne l’avait jamais été. Son regard caressait les courbes des différents corps, féminin comme masculin. Pas une once de haine. Pas la moindre rancœur. Il était libre et pourtant, ne le savait pas. Sans souvenir, comment se doutait que seulement quelques secondes plus tôt, il avait été un être noyé dans sa colère sourde ? Rien ne l’indiquait alors qu’il dansait, le cœur léger. Il découvrait le monde à nouveau. Il se découvrait lui-même dans cette béatitude. Combien de temps conserverait-il cet état avant que ses mauvais traits ne refassent surface ?

Pas longtemps.
Son corps possédait toujours les réflexes de l’homme qu’il était réellement. Sa main se perdit sur un plateau, s’empara d’un verre d’alcool. Champagne ? Peut-être. Il l’engloutit si vite qu’il s’en trouvait incapable d’en annoncer la couleur. A quoi bon après tout ? La fête l’emportait et un deuxième suivait déjà. Alexander voulait s’amuser et apparemment, cela faisait partie de sa définition du divertissement. On ne se refaisait pas après tout. Enjoué, un rire délicat s’échappa de sa gorge sans raison. Une blague d’un spectre perdu dans les folies du Crystal ? Un trébuchement loufoque d’une danseuse désorientée ? Un rien causait son hilarité et dans un pas chassé incertain, il s’approcha d’une demoiselle isolée qui avait capté son attention.

Doucement mais fermement, il saisit sa main délicate et y déposa un baiser dans un mouvement empli de légèreté. Son regard captura le sien. Ses lèvres souriaient contre sa peau. Ce rictus charmeur qu’il maitrisait tant se combinait à cette joie folle qu’il ressentait.

Ce soir, il était capable de tout.
Rien ne le retenait.
Absolument rien… pour le meilleur ou pour le pire.

Se redressant sans lâcher les doigts de la femme, refusant de rompre le contact autant physique que visuel, il s’approcha d’elle pour murmurer :

« Vous êtes absolument ravissante. Puis-je vous inviter à danser ? »

Il le pensait. Cela se voyait. Ses yeux rêveurs et sincères détaillaient sans retenue les formes de la créature. Il s’émerveillait de ce spectacle. Il découvrait ces nouveautés, ses réactions face à celles-ci. Sa page vierge se remplissait lentement. Si le désir ne se ressentait pas à la vue de cette charmante artiste, l’envie d’étirer un sourire sur ce visage magnifique demeurait présente. Ses instincts de séducteur reprenaient le dessus en se mêlant étrangement à cette hilarité presque enfantine et cette gentillesse habituellement enfouie profondément en lui.

Un autre verre rencontra ses lèvres tandis que son regard fixait avec intensité celui de son invitée. Accepterait ? Accepterait pas ? Qu’importait. Quoique… Un léger élan de fierté le fit se redresser. Tel un paon exposant sa parure à la femelle, il se tenait devant elle, droit. Gamin et heureux peut-être mais Narcisse refusait de s’échapper de ce corps. Elle voudrait de lui, la simple perspective du contraire lui hérissait les poils.

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Message par Ofelia Dim 2 Nov - 21:25

Éternel. Éternel recommencement de cette journée qui était, qui est, qui sera toujours hors du temps. Plus que jamais, le Crystal était à part. Plus que jamais, il était immobile. Plus de rires. Plus de danses. Plus de mouvement. Seulement le silence. Arrière, les tristes mortels au temps compté ! Les âmes des artistes, des esclaves du Crystal, des prisonniers que vous lui avez jetés en pâture, ces âmes doivent de nouveau faire le deuil. Le deuil d'une douleur qui ne leur appartient pas, d'une nostalgie qui pourtant transperce leurs cœurs. Le Crystal corrompu s'est emparé d'eux, plus que jamais. Il leur fait vivre son histoire et ressentir chaque parcelle de son être. Et dans ce torrent d'émotions sourdes, l'édifice semble laisser à l'abandon depuis des siècles, immuable. La poussière elle-même n'ose s'y déposer et les âmes en peine, errantes, immobiles, silencieuses, sont prisonnières de leur propre esprit. Nul n'y échappe.

Et soudain, par un déclic secret, orchestré par une main invisible, le deuil s'achève. Le Crystal se retire et sa nature redevient similaire aux autres jours. Les corps peuvent enfin se mouvoir, les esprits retrouver leurs habituelles occupations. Des lueurs surgissent, des parfums envahissent l'espace, la chaleur regagne les cadavres vivants. Un mystère épais qui ne dévoile jamais ses secrets.

Ofelia sort, comme toujours, totalement envahie par cette expérience. L'a t-elle vécu dix fois ? Cent fois ? Toujours cette sensation de déjà-vu, qu'elle n'arrive pas à appréhender, sans jamais pouvoir compter. Et ce spectacle qui les appelle, pour admirer la malédiction du cygne, la tyrannie d'un être machiavélique, un amour impossible que tout contrarie, les larmes du lac des cygnes, les larmes de Swann, à jamais prisonnière. Et la muse des arts de la main regarde au bord des larmes, la danseuse, la muse, l'âme ne laisser aucune empreinte sur la scène. Elle voit la mousse aérienne dessiner dans les airs des coups de pinceaux furtifs, doux, léger, blanc, flou dans le décor inerte qu'elle a elle-même peint il y a trois semaines, deux ans, une vie. Et le sang semble être l'encre de sa vie qui l'abandonne, le fluide du Crystal qui prend sa place. Et dans la mémoire de chacun, les entrechats laissent une marque indélébile, un souvenir déjà effacé. Le rideau tombe. Lourd. Implacable sur leur vie qui reprend, qui s'achève.

Décadence, débauche. Sensations, émotions. Vis. Vie. Semblant et apparence. Mémoire et souvenirs. De nouveau la mascarade. De nouveau, comme un appel à la vie après la mort qui semblait s'être emparé d'eux, les artistes se brûlent, enflamment leurs âmes. Substances éphémères faisant croire l'espace d'une soirée qu'ils pourraient frayer parmi les mortels, les normaux, comme s'ils appartenaient à leur monde. Le reflet du miroir n'est pas la réalité, bien qu'il soit vrai. Et dans ces éclats projetant des bribes d'anciennes vies, Swann, Swann danse le regard vide tandis qu'Ofelia passe son regard à la fois effrayé et plein de désir sur les damnés qui se souviennent. Plus grande souffrance ou don du Crystal ? Veut-elle se souvenir et souffrir ? Où s'abandonner à l'art qui surgit en elle comme un rythme effréné de son coeur, comme le fait Swann ?

Soudain, la surprise, alors qu'elle contemplait la folie douce et violente qui s'emparait de ces bougies éternelles, qui dansait comme si leur vie en dépendait. La surprise de sentir un contact sur sa peau qui habituellement était laissé intact du toucher d'autrui. On avait osé la toucher, elle, l'intouchable, celle qu'on contemple, qu'on ressent, mais jamais qu'on ne possède. Et l'intrus récidivait. Par un baiser. Une vague de frissons envahit la rousse vêtue du noir du deuil. Un souvenir tactile venait de refaire surface. La douceur d'un peau-à-peau d'une figure aimée. L'impression de s'unir fugacement à cet autre. Un sourire échangé. Une peur apparaissait dans les yeux de la femme sans émotions visibles. La peur du souvenir. La peur de la trahison. Mais envers qui ? Le besoin aussi, de sentir ce que sa peau avait oublié. Elle regarda l'homme qui n'était pas lui. Et accepta timidement, d'un acquiescement. Elle le vit charmeur. Elle se sentit charmé. Ses doigts étaient fins, délicats, doux. On ne pouvait pas être insensible.

Des notes retentirent. Abruptes. Mélodieuses. Sensuelles. Un violon fit retentir sa grinçante voix, qui glissait dans les airs comme les pieds d'Ofelia glissèrent sur le parquet en bois. Elle inspira l'air chargé et sentit un contact étrange, comme un fantôme du passé. Elle n'était plus elle, tandis que sa main emportait sur la piste l'audacieux inconnu. Ses yeux n'arrivaient pas à savoir si elle l'avait déjà vu entre ses murs et pourtant, il y avait comme une reconnaissance. Probablement celle de deux oiseaux en cage. Son corps semblait habiter, par une autre qui n'en avait pas fini avec ces souvenirs. Ofelia entama un tango effrené avec son partenaire de cette nuit étrange. Sensuelle, violente, elle alternait les rythmes, comme seuls pouvaient le faire les damnés sous l'inspiration de Swann. Elle ne se connaissait pas un savoir dans cet art, elle qui privilégiait l'immobilité au mouvement. Et pourtant, sa robe tournoyait, ses talons claquaient, ses mains et ses jambes se faisaient caressantes et osées. Elle releva son regard fiévreux sur le brun et la jeunesse fit place aux rides du vécu, aux yeux qui ont l'expérience, au sourire conquérant. Les cheveux mi-courts devinrent longs. Ce visage qui la hantait. Ce regard qu'elle connaissait. Elle repousse son partenaire, effrayée par celui qu'elle voit dans ses traits. L'envie en même temps de l'embrasser, de le serrer dans ses bras. Et cette indécision face à ce fantôme. Trahison par l'oubli, de celui qu'elle ne pensait jamais oublier. Fidélité, alors qu'elle danse dans les bras d'un autre. Tristesse, de ne pas l'avoir reconnu. Envie de ne plus le perdre. Et cette absence criante, déchirante.


"Tu n'es pas lui ! Comme je voudrais que tu le sois ! Je suis désolée ! Désolée !"

Elle repousse l'autre et s'enfuit à quelques mètres de là, dans la pénombre. Et déjà, elle sent que l'on aspire sa réminiscence. Le crystal veut effacer sa peine.

"Non ! Non ! NON ! Laisse-le moi ! Laisse moi ce souvenir de lui ! Je t'en prie !"

Mais rien n'y fait. Elle s'accroche, tandis qu'un parfum approche.

"Toi ! Toi ! Embaume mon cœur de lilas, de la rosée du matin sur l'herbe fraîche, embaume moi de la senteur des arbres ! Fais que je me souvienne de lui !"

Mais à genoux, Ofelia ne sent que la froideur du parquet lustré, elle ne voit que le plafond embué, elle ne sent que la fumée, l'alcool et l'odeur des corps épuisés par l'inspiration de l'art qui s'est emparé d'eux.

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Message par Alexander James Ven 14 Nov - 17:41

Les mains fines se déposèrent soudainement contre son torse. Le geste le surprit. Le refus d'autant plus. Vacillant de quelques pas en arrière, le pianiste récupéra un équilibre décent tandis que son orgueil s'enflammait au plus profond de ses tripes. Des doigts, comme pour la retenir, il effleura la menotte fuyante de la créature fragile qui courrait s'effondrer dans ses larmes et supplications. Son poing se referma dans la vide. Sa mâchoire se contracta sous cette colère nouvelle. Insulté. Il se sentait terriblement insulté. Quelques secondes, ses muscles demeurèrent figés. La musique continuait quant à elle. Le tango inlassable entrainait les amants oubliés dans des mouvements de pas endiablés. Les couples tournoyaient autour du brun immobile, l'ignorant complètement. Il faisait parti du décor. Cela ne dura pourtant pas, cette position lui déplaisait au possible. Esquivant nonchalamment les corps entrelacés, se frayant un passage entre ces danseurs de rêve, Alexander rejoignit la belle angoissée.

En chemin, il s'empara dans un pas de danse d'une étole carmin. Tel un prédateur, ses gestes futurs se dessinaient dans son esprit avec de plus en plus de précision au fil de son approche. Sa proie qui évoquait tant d'émotions contradictoires en lui ne s'échapperait pas si facilement. Il n'en avait pas fini, loin de là. Ses souvenirs oubliés, sa première découverte ne glisserait pas entre ses doigts. Il la retiendrait prisonnière jusqu'à ce que son esprit ne se lasse. Une cruauté l'enveloppait sans qu'il n'en connaisse la raison. La simple vue de cette femme misérable, pleurant sur le plancher luisant l'enjouait. Il se sentait presque rire face à ce spectacle. Mais ce n'était plus cette engouement enfantin qui le traversait précédemment, ou la joie innocente d'un gamin qui ne savait rien. Non, il s'agissait là de sentiments bien plus noirs qui ressortaient des tréfonds de son âme. La phase de renaissance touchait lentement à sa fin. Le phœnix déployait ses ailes. Il reprenait ses acquis, ses réflexes. Sa vraie nature ressortait, malgré les oublis. Cette amnésie temporaire - ou non - le déstabilisait légèrement. Sa haine n'était pas aussi nourrie qu'à l'accoutumée mais elle faisait tant partie de lui qu'il ne s'en défaisait pas. A moins que le Crystal ne joue sur ses émotions ? Ne s'amuse à tirer les fils de ce patin pour en éveiller les côtés les plus sombres après ses airs les plus charmants ? Pourtant, son âme torturé lui apportait de la joie en cet instant. La jouissance de voir un être haï sans raison se décomposer.

Se penchant lentement, les phalanges délicates du pianiste caressèrent les épaules de l'artiste, glissant presque avec sensualité sur ses bras. D'un mouvement souple mais autoritaire, il s'empara de ceux-ci et la força à se lever puis à se tourner vers lui. Chaque geste s'imprégnait du rythme des instruments fous de la salle. Ses lèvres se tordirent dans un rictus à la fois supérieur et cynique lorsque leurs regards brillants - l'un de larmes l'autre de joie - se croisèrent.  Le ton de sa voix se fit raillard, hautain.

« Vous ne comprenez vraiment pas n'est-ce pas ? »

L'enfonçant davantage dans la pénombre, le brun souriait toujours plus. Il attendait que le dos de sa partenaire ne rencontre le mur pour s'arrêter, envahissant largement son espace personnel, installé proche d'elle sans pour autant créer de contacts supplémentaires entre que celui de ses mains sur ses bras. Approchant ses lèvres de son oreille, la frôlant dans un geste qui se voulait troublant, il souffla lentement :

« Pourquoi vouloir se souvenir de lui ? Pourquoi vouloir se souvenir ? N'est-ce pas bien plus doux que d'oublier ? »

Remontant ses doigts jusqu'à sa joue, il y déposa une caresse avant de reculer légèrement pour entourer sa gorge délicate de l'écharpe volée. Une lueur espiègle illuminait son regard tandis qu'il brisait cette tenue de deuil de ce rouge tranchant, violent presque. La passion sur la douleur. C'était beau. Ne serrant pas plus que nécessaire, le pianiste la dévisageait avec attention. Sa curiosité se mêlait à une répulsion nouvelle. D'où venait-elle ? Aucune importance. Se souvenir n'était pas primordial. Vivre l'était. Se divertir tout autant.

Un pas en arrière. Main dans la main. Il l'entrainait dans son geste. D'un geste vif, il la força à effectuer un tour sur elle-même. Alex jouait avec elle. Il ne la réconfortait pas ni ne cherchait à la rassurer. Seul son propre plaisir lui importait et ce soir, exceptionnellement, elle était sa muse.

« Oubliez tout. A quoi bon se souvenir si c'est pour pleurer ?»

Il enroula son bras autour de sa taille, la collant à lui et souffla sur le ton de la confidence, de la tentation :

« Profitez simplement. Laissez vous aller et tout ira pour le mieux... Je vous le promets. »

Son visage se fit plus doux, plus envoutant. Son regard intense se plongea dans le sien, exprimant un intérêt certain. Il mentait effrontément pourtant. Si elle restait avec lui, rien n'irait pour le mieux. Certainement pas pour elle en tout cas...

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Message par Ofelia Mer 17 Déc - 22:06

Nul parfum agréable ne parvint jusqu'à Ofelia. Elle sentait la bataille faire rage en elle, tandis que des souvenirs confus arrivaient pêle-mêle dans son esprit. Certains étaient familiers, lui appartenaient vraiment. D'autres la laissaient perplexes et elle finissait par les repousser comme n'étant pas les siens. Autour de son corps jaillissaient des couleurs sur le parquet, qui s'entremêlaient, dansant au rythme des réminiscences, au rythme des sons, au rythme des corps qui s'agitaient. Et misérable, elle restait immobile au milieu de la danse des fragments de sa vie, entourée des êtres de son passé. Tant de culpabilité la submergeait. Tant d'absence. Celle qu'on peut nommer, celle qui fait hurler les tréfonds de son âme. Un visage aimé, tant aimé. Elle caresse d'un trait léger de pastel, la joue de celui qu'elle continue d'aimer, peint de façon éphémère sur le parquet luisant. Ce regard, sombre, triste, où le poids des années percent... Ce regard qu'elle a tant senti sur elle au Crystal. Il était venu pour elle, il était venu la sauver, mais le Crystal l'avait retenu, plus  subtile que n'importe quelle cage. Elle ne se souvient d'aucune supplication ou prière de sa part, seulement le son de sa voix quand il lui disait les mots les plus doux. Autrefois. Dans cette forêt où elle se sentait chez elle, entière. A sentir le vent dans ses cheveux. A entendre les rires de sa fille. Sa fille. Oh douce enfant, chagrin éternel, regrets abondants, de n'avoir pu l'élever, la voir grandir. Lui en voulait-elle, en cet instant ? Et de sa poitrine, de ses yeux sanglotants, l'encre rouge, vive, coulait interminablement. Nulle peinture ne pourrait jamais représenter le désespoir qui s'était emparé de la Muse.

Un sursaut. Encore. Elle sent l'intrusion sur son corps. Les caresses sensuelles se voulant rassurantes. Si la Muse éprouve presque comme une bénédiction le geste, Ofelia, elle, sent son corps se hérisser. Comme un reste de leur danse passionné, elle ressent avec violence et désir la façon dont il la relève, en harmonie avec les notes qui leur parviennent du salon. Elle contemple son visage souriant, narquois, à travers les larmes de ses yeux. Il lui apparaît flou, presque monstrueux dans ce prisme inhabituel. Elle le regarde, dans l'attente de la suite de ses mots interrogatifs. Tout entière à la peine qui l'agite, elle se laisse entraîner, contre sa volonté, plus loin encore dans le noir. Elle percute le mur et sent doucement la panique l'envahir, biche acculée entre l'inconnu et l'immuable, entre le rejet et l'oubli. Pauvre muse qui voit son espace vital s'amenuiser, alors que son cœur persiste à battre la chamade et que sa mémoire continue son ébullition douloureuse. La peau de son visage, toujours si lisse et sans expression, sent les émotions se frayer un chemin dans les fissures de son masque de perfection. La peur suinte et de son corps immobilisé s'échappe les couleurs sombres, houleuses, qui s'étendent peu à peu autour d'elle. Une tempête noire, teintée de gris nostalgique s'étale sur sa peau, avant de rejoindre, agitée le mur autrefois pêche.

Ofelia se sent démunie, face à la poigne et aux caresses de l'étranger. Elle ne bouge pas lorsqu'il lui noue autour de sa gorge délicate l'écharpe légère. Elle déglutit quand il ressert l'étau. Et derrière elle, le monde s'effondre, la pluie s'abat, divine, pleine de colère sur les marins apeurés, perdus en pleine mer. Les nuages se font lourds, menaçants. Et dans ses yeux, les larmes de l'impuissance l'étreignent.

Il la caresse, il la fait chavirer. Dans ses gestes, la douceur du prédateur. Et entre ses griffes, l'oiseau perdu, l'oiseau perturbé, qui ne sait plus si elle doit s'échapper ou se laisser guider. Où est-il, lui qui pourrait la sauver, lui qui brille par son absence quand, enfin, elle pourrait le reconnaître, lui redonner espoir. Et elle tourne, elle se retrouve contre celui qui la tente. Par l'oubli. Oubli qu'elle repousse en s'accrochant, encore, encore, désespérée à ses filaments de souvenirs. C'est le regard plein d'incompréhension qu'elle regarde l'homme aux doigts fins et délicats, aux yeux pleins de promesses de plaisirs.


"Mon ami, quelle vie avez-vous pu bien vivre pour ne pas souhaiter vous souvenir ? J'avais un mari. Une fille. Une vie. Maintenant, maintenant, je ne suis plus rien. Au quotidien, je ne sais plus qui je suis. Je sais juste que je suis seule. Éternellement. J'ai tout perdu. Mon identité, mon passé et mon futur. Je ne suis qu'une toile blanche dont les couleurs changent en permanence, dont les couleurs sont éphémères et ne parviennent jamais à se fixer. Je ne suis plus qu'une enveloppe qui ne contient rien que le vide, le silence, le présent sans sens."


Elle fuit son regard, détournant ses yeux de ce présent qu'elle ne veut pas, se concentrant sur les bribes. Là, un rire d'enfant. Ici, une larme de jouissance. Encore une mèche de cheveux qui caressent sa peau, en même temps que ses lèvres. Tendrement, elle sourit. Et croise le moment immobile de ce mouvement parfait et éternel, de la triste Swann. Dans ses pupilles, nulle trace d'un changement. Sur son visage, nulle empreinte d'un souvenir qui s'éveille.


"Voyez-là, la reine du Crystal, la muse entre les muses. Voyez son présent figé pour toujours. Voyez-vous un quelconque bénéfice à l'oubli ? Le Crystal lui a tout pris. Et bientôt, ce sera de nouveau notre tour. Depuis quand est-elle ici ? Depuis quand n'est-elle qu'une poupée entre les mains de ce bâtiment infernal ? Cessez vos tentations pleines de mirage. Nous vivons dans un enfer, que nous ne voyons qu'une fois l'an. Que ne donnerais-je pas pour me souvenir demain de lui, d'elle, de vous et de moi..."

Ofelia ne prêtait aucune attention aux corps qui divaguaient, qui pleuraient, qui riaient, qui s'abandonnaient à la folie de la connaissance douloureuse. Elle ne pouvait arracher de son observation de la danseuse. Elle savait que demain, elle serait de nouveau comme Swann. Qu'un jour, alors que tous se souviendront dans cette macabre cérémonie, elle, elle ne fera que peindre, que sculpter. Un réceptacle vide. Une coquille. Une bougie en fin de vie, que le Crystal finirait par souffler, car elle ne lui apporterait plus sa chaleur et sa lumière.

Alors elle esquive son étreinte, après l'avoir embrassé passionnément, pour le remercier, pour le contenter, et elle évite tous les damnés pour arrêter d'un geste la danseuse. Et pendant un instant, elle est une impression, un moment qu'Ofelia garde en sa mémoire, pour une futur tableau. Une esquisse du vide. De l'absence même du mot espoir.

"Swann, Swann."

Et la muse s'arrête. Elle ne connait pas si bien sa consœur. Ofélia ne partage avec elle que le bâtiment, son statut, son vide et sa connexion particulière avec le Crystal. Elle ne sait quoi dire pour apaiser... quoi ? Un chagrin ? Un néant ? Une envie frustrée ?

"Swann, arrête, arrête, il n'y a plus de représentations. Ne cède pas à son appel. Résiste."

Et dans un élan spontané, elle l'enlace. Comme une sœur. Comme une éternelle à une autre éternelle. Dans un moment encore figé.

"Tu ne te souviens vraiment de rien ?"

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Message par Swann Ven 2 Jan - 14:47

La salle est emplie de folie. La magie du Crystal rend pour un temps les souvenirs qu’il a volés. Ses artistes se souviennent. Une voix, un visage. Ami, ou ennemi. Souvenir heureux ou malheureux. Visages emplis de joie ou ravagés par la peur. Regrets ou soulagement. Swann, elle, ne se souvient pas. Le Crystal ne peut lui rendre ce qu’il lui a pris il y a si longtemps. Il ne peut que lui offrir un peu de chaleur et de reconnaissance, qu’il dépose dans son coeur, délicatement. Comme un amant poserait un baiser sur la joue de sa bien-aimée endormie.

Au centre de la Grande Salle, elle danse. Elle tourne et vole. En silence, respect teinté de curiosité, elle observe ses artistes tourmentés. Ses âmes perdues entre deux mondes, entre passé et présent. Elle les envie, un peu. Et en même temps elle est heureuse de ne pas leur ressembler. Ses souvenirs seraient-ils joyeux ? Lui arracheraient-ils des larmes de regret ? Ou au contraire serait-elle effrayée de ce qu’elle verrait ? Elle n’a pas envie de savoir. Pas vraiment. Les visages sont tous tourmentés. Les traits déformés par la peur, la colère, le déni. Pourquoi son sort serait-il différent du leur, si ses souvenirs existaient encore ? Elle peut s’abandonner. Transposer cette souffrance, cette folie, en Art.

Ils l’inspirent, ses artistes. En ces heures où les souvenirs les entravent, les aliènent. En ces heures où elle ne trouve plus le chemin de leur coeur. En ces heures où tout ce qui importe sont ces souffrances intérieurs, ces blessures qui se rouvrent, ces regrets qui les rongent. Le Crystal les libère, et eux pensent qu’il les enferme. Pauvres fous. Pauvre âmes incapables d’apprécier ce cadeau qu’il leur offre. Elle a le devoir de l’aimer, alors que tous ou presque le haïssent en ces instants de souvenirs. Et elle les aime, autant qu’il les aime, ces talentueux protégés. Même lorsqu’il les supplie de les laisser à leur ancienne vie, de leur redonner un avenir, un espoir.

Soudain une voix la sort de ses pensées. Une voix qui l’appelle, la nomme. Swann... Elle reconnaît ce nom comme étant le sien. Swann. Le Cygne. Elle fut nommée ainsi car c’est ce qu’elle était le premier jour de sa renaissance. Mais son vrai nom, elle ne le connaît pas. Personne ne le lui a dit. Personne ne l’a reconnue. Celle qu’elle fut n’est plus. Elle n’est plus que Swann. Muse parmi les Muses. Danseuse éternelle qui réchauffe les parquets du Crystal et les créations de ses artistes. Une main arrête sa danse. La Muse s’immobilise soudain, et le visage se tourne, interrogateur.

C’est une main amie, qui a stoppé sa danse. Une voix connue aux intonations inconnues. Elle est la Muse de la main. Celle qui défie l’immobilité en lui apportant tant de vie qu’on la croirait mobile. Celle qui offre à l’instant éphémère l’immortalité. Celle qui sublime de son pinceau les traits de celui ou celle qui l’aura inspirée. Swann la regarde avec bienveillance. Elle sent une agitation dans cette voix d’ordinaire si calme et posée. Elle sent une urgence, une inquiétude. Et elle veut calmer cette angoisse dans le regard de la Muse.

Arrêter ? Mais arrêter quoi ? Swann ne peut arrêter d’être ce qu’elle est. Elle n’est qu’Art, elle n’est que Danse, elle n’est que Muse. Demanderait-elle à un homme d’arrêter de respirer ? Alors pourquoi lui demander d’arrêter de créer ? Swann ne comprend pas. Alors elle ne dit rien. Elle se tait. Puis doucement, elle questionne. Innocence qui trouve sa source dans cette éternelle enfance. Un sourire indulgent sur ses lèvres.

- Pourquoi ne pas céder ? Pourquoi résister ?


La voix n’est que murmure, car la cible de ses mots est proche, si proche. Les bras de la Muse, protecteurs, entourent ceux de la protégée du Crystal. Et Swann enlace de ses bras le corps agité de la Muse des couleurs. Elle sent le coeur de la Muse qui bat contre le sien. La question d’Ofelia n’a qu’une réponse, et Swann répond gentiment.

- Non. Je ne me souviens de rien. Es-tu plus heureuse avec ces souvenirs ?

La main de Swann caresse la chevelure indomptée de sa soeur. Son corps a cessé de danser, mais son âme garde l’instant, elle le boit, et le garde précieusement pour en tirer une inspiration future. Incompréhension teintée de compassion. Corps contre corps. Âme contre âme.

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Message par Alexander James Jeu 29 Jan - 9:43

Les paroles de la muse n’inspiraient aucune peur ou colère dans le cœur du pianiste. Il se contentait d’écouter dans un silence las. Quand allait-elle terminer cette pompeuse tirade de dépressive ? La soirée se tenait sous le thème de la célébration. Les ordres du jour n’étaient que boire, danser et profiter. Certainement pas pleurer, repousser et souffrir. Le regard de l’ennuyé oscillait entre les deux muses. L’une acceptant son destin, l’autre se rebellant soudainement des bienfaits du Crystal. Comment était-il lui-même arrivé en ces lieux ? Les souvenirs fuyaient encore et toujours alors il haussa les épaules, résigné. Un haussement bref car coupé d’un baiser. Passionné, langoureux. Un frisson traversa son échine avec violence, hérissa les poils sur sa peau pale. L’excitation n’était pas au rendez-vous comme elle aurait dû l’être. Alexander ressentait du dégoût. Trop surpris par cette révulsion imprévue pour réagir, il ne la repoussa ni ne la retint lorsqu’elle s’enfuit vers leur muse à tous. Ses lèvres demeuraient entrouvertes, sous le choc. Sa langue s’y glissa lentement, lui arrachant un nouveau frémissement répugné. Il sentait encore les lippes de la peintre pressées contre les siennes. Il sentait encore son parfum devenu écœurant. Souhaitant se débarrasser de cette saleté, sa main si délicate sur les notes s’écrasa sans vergogne contre sa propre bouche. Frottant, il étala le contact reçu. Son esprit s’embrumait et un mouvement de recul le fit heurter le mur derrière lui. Sa main se trouvait couverte d’une peinture. Une peinture pourpre. Presque noire. Comme une maladie, elle se propageait. L’aquarelle loin d’être sèche coulait contre son épiderme, contaminant ainsi son corps lentement. Plus il cherchait à s’en débarrasser, plus il teintait le reste de sa peau. Les doigts de son autre main se retrouvèrent ainsi infectés par cette substance visqueuse. Nécrose, peste. Il n’osait même pas regarder ses lèvres qui devaient être d’autant plus touchées par cette calomnie. La panique s’empara de lui. Elle le saisit au plus profond de son âme. Pourquoi souffrait-il ainsi ?! Il n’était pas celui qui avait rejeté le Crystal ! Il voulait simplement se réjouir de ces festivités comme tous les autres ici ! Personne ne semblait d’ailleurs remarqué son trouble. Seul lui tremblait face à ce démon imprégné dans sa peau. Était-ce là la punition pour s’être joué d’une muse ? Dans son entêtement, il refusait d’y croire. Les verres avalés si joyeusement plus tôt venaient maintenant entachés sa réflexion. Préférant donc l’action, ses ongles s’enfoncèrent dans les parties envenimées, mêlant avec douleur un vermeil vif au sombre pourpre. Les dents serrées, Alexander blêmit d’effroi lorsqu’une goutte dégoulina sous sa chemise, le long de son torse. Il la sentait courir sur son épiderme, le narguer et l’épouvanter presque gaiement… Sa mémoire avait après tout déjà omis ce détail : il avait enlacé la maudite.

Alors même que des tremblements s’emparaient de sa personne, un doux contact détourna son attention. Il s’agissait là d’une caresse tendre mais si… aérienne. Une brise légère qui effleurait avec langueur sa peau gangrenée. Le geste était dénué de peur et sa confiance se transmettait au pianiste terrorisé. Son regard eut le plaisir d’admirer un visage jeune au sourire réconfortant. Il lisait dans cette apparence translucide une affection qu’il ne connaissait pas. Les traits lui restaient aussi inconnus que le reste de son passé. Il ne savait remercier assez cette apparition pourtant. Ses doigts désirèrent capturer ce beau fantôme. De tout son cœur, Alex souhaitait serrer sa main de la sienne, laisser sa confiance le gagner… Il n’en fut pourtant rien. Sa chair traversa l’illusion qui recula pour ne pas le peiner davantage. L’esquisse ne se décrochait pourtant pas des lèvres envoutantes de son sauver. D’un pas hésitant, le brun débuta la poursuite. La peinture effroyable s’était effacée où sa main avait été touchée. Alors naturellement, il tendit ses doigts encore teintés. L’ombre écouta cet appel à l’aide et dans une nouvelle caresse, retira ses maux. Le soulagement glissa sur les lippes souillées de l’ensorcelé du Crystal. Ses pas continuaient de l’attirer vers le spectre fuyant. La danse improbable se déroula quelques minutes sans que jamais l’homme ne s’en lasse.

Son chemin le mena inconsciemment jusqu’à une autre personne. Non loin des deux muses enlacées, l’apparition se dissout dans le corps où elle se heurta. Le souffle avait emporté le fantôme mais la trainée d’aquarelle qui s’étalait sur le torse du pianiste ne lui offrit pas la possibilité de s’apitoyer sur cette disparition. Un pincement au cœur tout au plus. La peur reprit ensuite. Ses iris noisette qui suivaient si hardiment ce fuyard héroïque se retrouvèrent plantées dans une entité bien réelle. En une seconde, le corps entier était dévisagé : mâle. Son second miracle ? Sans réfléchir davantage, Alexander s’y collait fougueusement. Toujours aussi autoritaire dans ses mouvements, il s’empara des lèvres de l’homme pour faire disparaitre des siennes ce mal qui le recouvrait.

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